C’est le mardi, 16 janvier 2024 qu’a eu lieu une réunion conjointe entre les officiers de l’armée congolaise (FARDC) et ceux de la Force régionale de la SADC (SAMIRDC), au Centre de Coordination des Opérations (CCO), installé à l’aéroport de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu.
Selon le compte-rendu de la séance de travail fait par le Lieutenant-Général Fall Sikabwe, Coordonnateur des opérations militaires congolaises au Nord-Kivu, la mission de la force régionale de la SADC est est offensive et consiste à appuyer l’armée congolaise à combattre et à éradiquer le M23 et d’autres groupes armés qui continuent à perturber la paix et la sécurité dans la partie orientale de la République Démocratique du Congo.
Et, pour éclairer davantage l’opinion sur la mission de la force régionale de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe en République Démocratique du Congo (SAMI RDC), nous avons interrogé un expert des questions militaires et de défense, le Professeur Jacques Djoli Eseng’Ekeli, qui revient d’abord sur le rôle de cette mission militaire sous-régionale.
« Dans le cadre du pacte de défense mutuelle de la SADC, il a été créée ce qu’on appelle la SAMIRDC, cette force qui devait appuyer les FARDC dans leurs efforts de rétablissement de l’autorité de l’État et de l’intégrité du territoire, dans la partie Est de la RDC, qui est en proie aux groupes armés et particulièrement le M23, qui constitue une sorte d’appendice de l’armée rwandaise sur notre territoire.
Nous espérons que cette réunion a permis de définir un concept opérationnel clair, d’autant plus que, selon le Général Fall Sikabwe, Commandant de la Force Terrestre, le mandat de cette force régionale est offensif. Il est clair que c’est une mission d’appui aux efforts des FARDC, qui sont, elles-mêmes, montées en puissance en matériels, en hommes et j’espère aussi en vision.
Donc, avec l’apport de cette force de la SADC, qui a déjà eu à faire ses preuves en 2012 et 2013, en défaisant le M23.
Et surtout que les troupes de l’EAC, qui viennent de quitter le territoire congolais, étaient pratiquement composées de nos agresseurs.
Aujourd’hui, ce sont les FARDC, appuyées par les éléments de la SADC, qui vont permettre que nous puissions restaurer l’autorité de l’État, retrouver notre intégrité territoriale et permettre à des millions de congolais qui vivent dans des camps de réfugiés, dans leur propre pays, dans des conditions exécrables, puissent rentrer dans leurs terroirs », a-t-il expliqué.
A la question de savoir si les congolais ne vont pas déchanter avec le déploiement de la force de la SADC, comme c’était le cas avec la force de l’EAC, sur qui la RDC avait placé beaucoup d’espoir, le député national réélu et Vice-président de la Commission Défense et Sécurité de l’Assemblée nationale rassure.
« La force de l’EAC, dont l’état-major était composé également d’officiers rwandais et aussi des ougandais (dont la duplicité n’est plus à démontrer), n’était pas prête à nous accompagner dans notre combat pour la restauration de l’autorité de l’État et de notre intégrité territoriale, tel que recommandé par le protocole de Nairobi et de Luanda. C’est pourquoi la RDC a mis fin à la mission de l’EAC.
Bien au contraire, dans le cadre du pacte de défense mutuelle de la SADC, les choses sont claires : il est question dans cet accord de soutenir la RDC à restaurer son autorité et son intégrité à l’Est. Ça c’est sur le plan de droit.
Secundo, sur le plan opérationnel, le commandant de la SAMIRDC, le Général sud-africain, Monwabisi Dyakopu, est un ancien membre de la Brigade d’intervention rapide de la MONUSCO, qui a participé à des opérations militaires, qui ont permis de démanteler le M23 en 2012 et 2013. Il a donc une connaissance du terrain et des enjeux », a-t-il rassuré.
Pour l’expert militaire Jacques Djoli, les congolais sont en droit d’espérer qu’avec l’accompagnement de la SAMIRDC, l’armée régulière de la RDC va cette fois en finir avec les terroristes du M23 , soutenus par l’armée rwandaise.
« Donc, nous espérons et nous attendons, pour nous, peuple congolais, que les FARDC, qui ont été requinquées, qui ont reçu énormément des moyens, des ressources financières, logistiques, des moyens de combat multiformes, vont contraindre le M23 à libérer les territoires occupés, conformément aux engagements de Luanda. Parce que, contrairement à ce que les gens croient, le schéma de sortie de cette guerre n’est pas strictement militaire, il est également politique et diplomatique », a-t-il indiqué.
Et le Professeur de droit, Jacques Djoli Eseng’Ekeli d’expliquer que c’est l’esprit va-t-en-guerre du M23 et leurs soutiens rwandais qui justifie le recours aux moyens de contrainte militaires par le Gouvernement congolais.
« L’usage de la force s’est toujours justifié par le refus du M23 de se conformer aux prescrits des accords de Luanda et de Nairobi. Entêté par le Rwanda, le M23 a continué à occuper et à bombarder des territoires, à se renforcer militairement, et en se transformant en Alliance Fleuve Congo, une association maffieuse.
Le M23 a donc le choix de se conformer au protocole de Luanda, en déposant les armes et en rejoignant les camps de cantonnement ou faire face à la puissance de feu des FARDC appuyées par les troupes de la SADC. Parce que nous n’allons plus revivre la situation où les troupes de l’EAC, qui avaient un schéma de pourrissement de la situation, sympathisaient avec le M23 qu’elles étaient censés mettre hors d’état de nuire », a-t-il martelé.
Et, au-delà de la solution militaire, Jacques Djoli Eseng’Ekeli insiste également sur une approche holistique dans la résolution définitive de la crise sécuritaire à l’Est de la République Démocratique du Congo.
« La réponse à la crise de l’Est est une réponse globale : il y a l’aspect militaire, il y a aussi l’aspect diplomatique, parce que la guerre ou les guerres de l’Est ne sont pas des guerres créées par des congolais, tout simplement. Les groupes armés sont ravitaillés par nos pays voisins, qui sont dans l’exploitation illégale de nos ressources.
Comment ils obtiennent les armes ? Chez qui ils vendent l’or et le coltan ? C’est auprès des pays voisins, qui sont au cœur de la déstabilisation et de l’appauvrissement de l’État congolais.
Donc, la réponse est globale, notamment parce le M23 est une fabrication rwandaise. On ne peut pas résoudre la question de l’Est si le Rwanda ne renonce pas à son attitude belliqueuse, dictée par des intérêts économiques. Il faut également noter que le Rwanda a également des problèmes avec le Burundi.
Et, il est important qu’il y ait une clarification de nos relations avec l’Ouganda. On doit sortir de cette hypocrisie collective.
Grosso modo, la réponse à la crise de l’Est est globale : elle est économique, politique, diplomatique et elle est essentiellement militaire, parce que nous devons disposer d’une armée dissuasive, capable d’assumer la sécurité des neuf frontières que nous avons », a martelé l’expert militaire, Jacques Djoli Eseng’Ekeli.
JR MOKOLO