Prof Jacques DJoli : »Pour reformer notre système judiciaire, nous devons refonder notre pensée globale et notre agir collectif »

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Dans le domaine judiciaire, l’année qui vient de s’achever a été marquée notamment par la tenue des États Généraux de la justice. Et parmi les éminents intervenants à ces assises, il y avait le Professeur de droit, Jacques Djoli Eseng’Ekeli. Dans un entretien avec nos confrères de Radio Okapi, l’actuel Rapporteur du Bureau de l’Assemblée nationale est d’abord revenu sur la responsabilité des acteurs de la justice dans la réforme du système judiciaire congolais. Il dit avoir insisté dans sa présentation sur la formation et le comportement des magistrats et du personnel judiciaire.

« La mission du Magistrat est d’abord un sacerdoce. C’est une mission qui a pour fondement l’éthique, la dimension humaine, l’essence de l’État, la quintessence même de la justice.
Je sais de quoi je parle. Est-ce que l’acteur-juge ou tout simplement l’acteur-Magistrat, mais au-delà de magistrat, tous les gens de justice, c’est à dire les greffiers, les secrétaires du parquet (ce qu’on appelait les huissiers de justice), même les avocats, comment sont-ils formés ? Quelle est la sève éthique qui permet de saisir la portée substantielle de leur mission? C’était ça notre réflexion (…) », a-t-il rappelé.

Pour le Professeur Jacques Djoli, une loi de programmation de la justice est plus que nécessaire, pour mettre en exécution les réformes proposées à l’issue des États Généraux du secteur judiciaire.

« Nous espérons maintenant qu’à l’issue de ces échanges, les recommandations, qui ont été prises et qui doivent faire l’objet d’un consensus, vont s’articuler en termes des projets. Et je sais qu’il y a des projets qui vont venir, d’autres sont venus, et ça doit se traduire en acte.
Pour ce qui nous concerne, nous voyons demain l’arrivée d’une loi de programmation de la justice avec tous ces aspects : outre l’aspect formation, outre l’aspect budgétaire, il y a les aspects pénitentiaires », a-t-il indiqué.

En tant que panneliste lors des assises, Jacques Djoli n’a pas manqué de se prononcer par rapport à l’opinion selon laquelle les États Généraux de la justice étaient un fiasco.

« L’échec ou la maladie qui frappe le pouvoir judiciaire ne doit pas être isolé de toute la pathologie sociale. C’est vrai que, comme je l’ai dit, la justice élève une nation et à ce point de vue, la justice paraît comme l’expression, le thermomètre de cette dérive sociétale globale. Ce qui est important, c’est que nous puissions être capables de nous écouter, magistrats, gouvernants et l’ensemble de la société. Est-ce que les magistrats ont seuls la responsabilité de cette dérive ? je ne crois pas.
Je crois que, lorsqu’on doit mettre en place un projet, il y a d’abord la première la vision, qu’est-ce qu’on veut ? Lorsqu’on a dégagé le premier V, qui est la vision, c’est le deuxième V, la volonté de traduire cette vision en acte. Et ces actes, ce sont les vecteurs. Et après, il y a tout. Dans les vecteurs, ce sont des programmes mais ces programmes doivent être articulés, et il y a moyen. C’est pour cela je parlais d’une loi-programme, parce que cette loi-programme dira, par exemple que, pour refonder notre système judiciaire en prenant en compte tous les éléments, il faut par exemple 10 milliards. C’est comme la loi de programmation militaire », a-t-il expliqué.

Concernant les accusations portées contre le Parlement d’entraver les actions du ministère public, en empêchant la poursuite de certains élus du peuple, à cause des immunités parlementaires et des privilèges de juridiction, le Rapporteur du Bureau de la chambre basse du Parlement répond.

« Les immunités ne sont pas synonymes d’impunité, ce sont tout juste des privilèges, s’il faut les appeler ainsi, ou des mécanismes de protection d’une fonction. Je suis député national. Pour assurer ma mission de représentant du peuple, j’ai besoin d’un minimum de garanties pour assurer mon indépendance mais cela ne veut pas dire qu’en dehors de cette mission de représentation.
Et dans la pratique, je peux vous rassurer, je suis parlementaire il y a plus de 20 ans aujourd’hui, je n’ai jamais vu l’Assemblée ou le Sénat s’opposer à une demande de réquisition aux fins d’instruction, parce qu’il faut dire que la levée de l’immunité est précédée d’abord par l’autorisation pour aller entendre le député et ce n’est que lorsque l’instruction terminée qu’on arrive à la levée de l’immunité pour les poursuites », a martelé l’éminent juriste, Jacques Djoli Eseng’Ekeli.

Enfin, le Rapporteur de l’Assemblée nationale a saisi cette opportunité pour présenter ses vœux les meilleurs à tous ses compatriotes congolais épris de paix et de justice. Il dit espérer que la tenue des États Généraux de la justice va faire avancer le système judiciaire congolais mais estime qu’au-delà du système judiciaire, les congolais ont besoin d’avoir un pays plus beau qu’avant. Ce qui appelle, de son point de vue, à une refondation de la pensée globale du peuple congolais.

JR MOKOLO

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